Foot togolais : Interview exclusive avec Abdallah Issaka, agent de joueurs FIFA

Dans le football moderne, l’agent de joueur joue un rôle primordial dans la carrière d’un footballeur. De la détection des talents jusqu’à leur insertion professionnelle, Abdallah ISSAKA, titulaire d’une licence d’agent de joueurs FIFA, nous dit tout dans un entretien accordé à Lintegral.tg.

JS : Bonjour, présentez-vous !

AI : Bonjour, je suis Abdallah ISSAKA,agronome de formation et agent de joueur FIFA.

JS : Qu’est-ce qui a réveillé le désir en vous de devenir agent de joueurs FIFA ?

AI : Eh bien étant un passionné de football depuis le bas âge, j’ai toujours rêvé d’être un footballeur professionnel, malheureusement la vie en a décidé autrement.Ne pouvant pas être un acteur sur le rectangle vert j’ai choisi d’être un acteur hors du rectangle. Il fallait que je sois le plus proche du jeu, et quoi de mieux qu’un agent de joueurs.

JS : Quelles ont été les principales étapes pour l’obtention de votre licence FIFA?

AI : Je dirai que les étapes n’ont pas été trop compliqué pour moi pour être honnête. Je savais ce que je voulais du coup je me suis juste donné les moyens et Dieu a fait grâce.

D’abord il fallait s’inscrire sur le site de la FIFA, ensuite réunir quelques dossiers pour la fédération,et dès que vous êtes éligible vous payez les frais d’inscription pour l’examen, vous accédez à la plateforme des agents où vous trouverez le matériel pédagogique (le document) pour l’examen. Vous avez aussi la possibilité de passer des examens blancs sur la plateforme des agents pour vous familiariser avec le format de l’examen. On note aussi qu’à l’examen il faut au moins 15 pour réussir. Après l’examen il faut payer les frais de licence avant de recevoir cette dernière. On note également il faut toujours suivre la formation professionnelle continue pour conserver sa licence. Pour tout dire c’est carrément un processus assez facile et compliqué à la fois.

JS : En quoi consiste concrètement le travail quotidien d’un agent de joueurs ?

AI : Il faut dire que le travail d’un agent consiste à trouver de meilleurs opportunités pour son client qui est le joueur, le conseiller, le guider, être au petit soin et lui assurer une image positive. J’ai l’habitude de dire que l’agent de joueur est le protecteur du joueur, Il doit protéger son joueur comme une lionne protège ses petits parce qu’il faut noter que le football est un domaine rempli de charognards qui sont prêt à tout pour profiter du joueur quand tout va bien dans sa carrière.

JS : Quelles sont les qualités essentielles que doit avoir un agent de joueurs afin de réussir sa mission en particulier au Togo ?

AI : Je pense avant tout qu’un bon agent doit forcément être un bon négociateur afin de mieux défendre les intérêts de son joueur, ensuite il faut connaître le droit du sport et les règlements en vigueur de la FIFA et enfin un bon agent doit avoir un bon réseau.

De façon particulier vu le climat footballistiquement parlant un bon agent doit juste avoir de la chance (…)

JS : Quelles sont, selon vous, les principales difficultés que rencontrent les jeunes talents togolais souhaitant s’exporter ?

AI : Selon moi le problème des joueurs togolais, c’est la formation à la base. Vous savez le football n’est pas sorcier quand le travail est bien fait ça porte toujours des fruits et quand on saute les pas on a toujours des difficultés devant.

JS : Les clubs locaux collaborent-ils efficacement avec les agents agréés ?

AI : Pour être franc les clubs locaux préfèrent dealer avec les non agents que nous parce que nous, nous travaillons pour nos joueurs qui sont nos clients donc l’objectif premier c’est leur intérêt avant le nôtre ; donc il y a des choses qu’on ne peut pas se permettre contrairement aux non agents qui n’ont pas de compte à rendre à qui que ce soit.

JS : Comment identifiez-vous les opportunités de transfert pour vos joueurs ?

AI : Je disais tantôt qu’il faut avoir un bon réseau car un bon agent ne travaille pas seul. Dans un réseau il y a des scouts, des directeurs sportifs, des coachs, des clubs qui recherchent toujours des profils donc il suffit d’avoir le type de profil recherché ou peut être similaire et les discussions commencent. C’est pas sorcier quand tu es dans un bon réseau, c’est pas aussi difficile que ça. Quand tu en places un qui est bon, forcément ils reviendront quand ils auront besoin d’autres profils.

JS : Comment assurez-vous la protection des intérêts des joueurs que vous représentez, notamment les plus jeunes ?

AI : Au niveau des plus jeunes il faut toujours être en contact avec les parents parce que l’avis du joueur mineur seul ne compte pas ; il faut toujours l’avis de son tuteur légal. Quand j’y pense il y a un document de la FIFA consacré uniquement pour les joueurs mineurs qui s’intitule The Guardian qui détaille tout ça. Il faut noter aussi qu’en tant que agent, il faut avoir une autre certification (évaluation réservée aux agents FIFA) qui nous permet de représenter les mineurs.

JS : Comment pensez-vous pouvoir contribuer au développement des jeunes talents togolais ?

AI : Au niveau des jeunes talents, il faut juste que les jeunes soient détectés au bas âge afin de leur assurer une bonne formation. Ensuite le reste n’est que détail. Footballistiquement parlant les jeunes togolais sont pour le moment inexistant et j’espère que avec les centres de formation, on arrivera à changer l’image que l’extérieur a de notre football.

JS : Quel est votre souhait pour le football togolais ?

AI : Mon souhait pour le football togolais c’est de voir nos petites catégories (U17 & U20 ) participer aux coupes d’Afrique et à la coupe du monde parce qu’au niveau des catégories de jeunes ce sont des compétitions de cette envergure qui ouvre réellement les portes des clubs professionnels européens. Mon second souhait c’est que nos centres de formation arrive à signer des partenariats avec des clubs extérieurs et pouvoir envoyer des joueurs en essai chaque année.

JS : Que pensez-vous du championnat togolais, en terme de rendement et de gestion de joueurs par les dirigeants ?

AI : Je pense que le championnat togolais est toujours très amateur et manque de visibilité, ce qui est très logique.

En terme de rendement de joueurs, il y a encore beaucoup de travail à faire venant de nos joueurs s’ils veulent vraiment s’exporter, mais on note quelque perles rares qui se démarquent ; ce qui nous encourage à suivre le championnat quelque fois.

Un joueur c’est lorsqu’il est mis dans de bonnes conditions qu’il donne un rendement. Comme le dit-on souvent, on ne travaille pas le ventre affamé. Un joueur qui n’a pas reçu son salaire depuis deux mois ne pourra jamais donné un bon rendement. Les dirigeants doivent vraiment prendre la chose au sérieux pour améliorer les conditions de travail des joueurs.

JS : Que faut-il faire pour rendre le championnat togolais attractif ?

AI : Je pense que pour rendre le championnat attractif, il faut lancer les jeunes très vite donc de ce fait tous les clubs doivent avoir toutes les catégories de jeunes, permettre à ces derniers de faire leur preuve et acquérir de l’expérience. Il faut également avoir une politique sportive sans faille qui puisse attirer des sponsors, avoir des infrastructures de qualité parce que c’est tout ce qui peut attirer des partenaires de l’extérieur.

JS : Qu’est ce qui empêche les centres de formation togolais de faire sortir leurs pépites comme le font les autres centres de formation de la sous région ?

AI : En gros, je pense qu’il y a la formation qui n’est pas au top, le manque de visibilité et surtout le facteur âge. Un joueur s’il doit jouer dans son championnat local doit être lancer à 16 ou 17 ans comme ça il sait qu’il a une saison pleine ou deux pour impressionner et signer un vrai contrat professionnel à ses 18 ans. Un joueur qui commence le championnat à 23 ans vous voyez qu’il a moins de chance de s’en sortir .

JS : Quels sont selon vous les facteurs déterminants pour atteindre l’excellence sportive ?

AI : Je pense que pour atteindre l’excellence sportive, il faut de l’engagement, la concentration, la faculté à ne pas se laisser distraire, beaucoup regarder des vidéos de ce qui fait de mieux ailleurs, avoir accès à des évaluations de performance réaliste, avoir un entraînement de qualité, la capacité à gérer la pression, la conscience de soi et surtout croire au processus.

JS : Comment peut on transformer un jeune joueur talentueux en un futur professionnel ? Y a t’il des critères à prendre en compte?

AI : Oui, je pense que le talent seul ne suffit. Vous savez aujourd’hui il y a des standards très élevés qu’il faut respecter quand on veut jouer au haut niveau. Il faut une alimentation saine et équilibrée adaptée aux sportifs de haut niveau, il faut beaucoup de repos, et surtout un bon entourage. Parce que les jeunes, dès qu’ils sont mal entourés, commencent par prendre la grosse tête et toute la carrière brillante qu’il pouvait avoir tombe à l’eau.

JS : Pensez vous qu’il est obligatoire pour tout joueur d’avoir un agent ?

AI : Oui, qui veut aller loin doit ménager sa monture. Le joueur doit se contenter sur le terrain et l’agent fait le reste du boulot.

JS : Votre mot de fin

AI : A la prochaine personne qui me posera la question à quoi sert un agent ? Je dirai tout simplement : à protéger un rêve, à construire une carrière et à guider une famille.

Le football est un processus et comme j’ai l’habitude de le dire : TRUST THE PROCESS.

Interview réalisée par Justin SOSSOU

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